samedi 2 mars 2019

Reliefs de la consommation culturelle, le 2 mars 2019

Fin d’un poème de Marceline Desbordes-Valmore, « Une halte sur le Simplon », dans Bouquets et Prières (1843), dédié à Pauline Duchambge, la compositrice :
« Italie ! Italie ! égarante sirène !
De ton grand peuple esclave insoucieuse reine !
Ce n'est pas dans ton sein qu'une âme peut guérir ;
Tes parfums rendent fou, tes dédains font mourir !
Toi qui ne dois qu'à Dieu ton ardent diadème,
Les pieds aux fers, tu dors dans l'orgueil de toi-même ;
Sous tes yeux à demi fermés d'un lourd sommeil.
Nous formons (tu l'as dit) une ombre à ton soleil.
Tu n'extrais que pour toi le doux miel de tes phrases.
Tu ne nous aimes pas, tu railles nos extases ;
Cruelle ! à tes amants tu donnes sans remord.
Après l'enchantement, la démence ou la mort. »
J’écoute de Duchambge le « Cancione amoroso », la mise en musique d’un poème du Portugais Gil Vicente (1465-1537) qu’a traduit Amable Tatsu (1798-1885, nom splendide !) que je ne connaissais pas, alors que Sainte-Beuve lui a consacré une notice dans ses Portraits contemporains, que Victor Hugo et Chateaubriand lui ont dédié des œuvres. Misère de la misogynie.



La Bête lumineuse, documentaire de Pierre Perrault (1982). Tranche de vie d’amis québecois partis à la chasse à l’orignal six jours, auxquels se joint un de leur cousin poète, en décalage complet. Forêt moche, ivrognerie, grossièreté de l’être. Et pourtant, il y a chez ces personnages (la mise en scène est soignée, malgré l’impression documentaire) une simplicité attachante. Le poète, Stéphane-Albert Boulais, qui a alors une trentaine d’années je crois, hautement inspiré, et qui, à partir de ce tournage, s’est rapproché de Pierre Perrault et du cinéma, n’a pas écrit, semble-t-il, beaucoup. Sauf, tout de même, plusieurs volumes des contes sur sa région, la Haute-Gatineau. Ce documentaire brut d’apparence, mais fortement structuré au montage, a inspiré la série documentaire belge Strip-tease (1985-2012). Peu de moyens (relativement aux productions fictionnelles) mais une pleine puissance narrative (la narration comprise selon Walter Benjamin comme « transmission de l’expérience »). Quelque chose qui pourrait peut-être échapper à ce qui condamne intrinsèquement le cinéma comme art capitaliste : la nécessité du financement.



Cours sur la chaîne Youtube « Veni, Vidi, Sensi » sur le général Boulanger (cette chaîne a diffusé toute une série de cours sur la Révolution française qui permet de compléter, comparer, réviser l’étude du livre de Furet et Richet). L’inspiration américaine de ses campagnes électorales. La gangrène française de ce mythe de « l’homme providentiel ». Sur lequel s’est construit la Ve République, et avec lequel il faudrait en finir. Amusant, du reste, que c’est au pays de la décollation du roi que ce mythe perdure le plus en Europe (il est cependant une réalité, plus ou moins grave, un peu partout de Russie en Afrique, d’Europe aux États-Unis). Ce qui sauve Boulanger, c’est son suicide sur la tombe de sa maîtresse, à Bruxelles. Il n’y a rien de plus héroïque dans sa vie misérable.

Saint-Just en mission dans l’armée de l’est, qui se prend (à 25 ans) pour un spécialiste des questions militaires, accentue la discipline, fait arrêter de hauts responsables et fusiller des récalcitrants. Il y a une certaine folie chez Saint-Just, et une mauvaise foi meurtrière, qui s’identifie au rôle qu’il joue.

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